Le monde passe ! – 31 décembre 2020

par | 31 décembre 2020

Frère David Perrin

Il est de tradition (depuis quand, je ne sais ?) d’échanger à la fin de l’année et au début de la nouvelle, des vœux et des souhaits. Plus que les formules elles-mêmes, souvent convenues, louons surtout l’intention. Les vœux sont l’occasion de prendre des nouvelles des uns et des autres, de manifester notre amitié. Je suis pour ! Mais ces vœux bien intentionnés me donnent toujours l’impression, sans vouloir jouer les rabat-joies, d’une forme dégradée, déchristianisée, de prière. Faute de pouvoir prier Dieu franchement, on formule des vœux, même si on sait qu’il n’y a personne pour les exaucer. Ce n’est pas grave, on les dit quand même. Les vœux de fin et de début d’année me font penser à des avions qu’on fait circuler sur le tarmac mais qui ne s’envolent pas, parce qu’ils ne s’achèvent pas en prière.
Contrairement à ceux qui les formulent, je crois dur comme fer que les vœux peuvent être exaucés, que les souhaits peuvent s’accomplir et même, d’une certaine façon, que les rêves se réalisent. Mais à condition qu’ils soient remis dans les mains du seul être qui a le pouvoir de les réaliser : Dieu. Sans lui, les vœux sont comme des avions cloués à terre !
 
Alors plus que des vœux et des souhaits, à la mode païenne, ce sont des prières, à la mode très chrétienne, que je vous invite à formuler et à adresser à Dieu pour cette nouvelle année. « Vivez dans la prière et les supplications, s’écrit saint Paul, priez en tout temps, dans l’Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints. » (Ep 6, 18) Demandons, avec piété et persévérance, à Dieu, les biens supérieurs, ceux qui viennent du ciel et en premier lieu, le salut de l’âme : la nôtre et celle des autres. À quoi bon, en effet, la santé des corps, si les âmes se meurent ! Et elles meurent, en masse, en ce moment.
 
Ce n’est pas jouer au prophète de malheur que d’annoncer la mort prochaine de notre civilisation post-chrétienne. Comme un serpent, celle-ci va bientôt faire sa mue et revêtir une nouvelle peau. Des temps païens, barbares, adviennent. Tout l’indique. Nous ne rendons plus aux morts les honneurs qui leur sont dus. Nous manipulons le vivant comme des apprentis sorciers. Nos enfants ne savent plus lire ni écrire. La défiance permanente et le complotisme sont le dernier acte, logique, du relativisme généralisé. Nous idolâtrons, sans le dire, l’argent et le sexe et nous nous abîmons dans une adoration perpétuelle du sacro-saint écran. Nos libertés rétrécissent comme peau de chagrin. Nous nous laissons suivre à la trace, par nos portables qui nous tiennent en laisse. Nous nous jetons dans une servitude volontaire, en attendant toujours plus de l’État, quand nous devrions compter sur nous-mêmes. Nous refusons l’héritage de nos pères et cultivons la haine de nous-mêmes. Les blancs s’accusent d’être blancs et dominateurs dans de grands procès dans lesquels ils professent le credo décolonialiste, sur fond de néo-féminisme misandrique. Le laïcisme, parce qu’il est un anti-christianisme, mange dans la main de l’islam, qui prospère sur le sol français. Une nouvelle civilisation advient et il faut être aveugle pour penser qu’elle a encore une chance, demain ou dans les prochaines années, d’être chrétienne.
 
Notre monde changera plusieurs fois de peau avant de redevenir chrétien, si tant est qu’il le redevienne un jour. Mais toutes ces mues passeront les unes après les autres : « Le monde passe, et sa convoitise avec lui. Mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure pour toujours. » (1 Jn 2, 17). Seul demeure celui qui est fermement attaché au Christ et qui accomplit, jour après jour, sa volonté, en serviteur inutile. Voilà mon souhait, le vœu que j’adresse à Dieu en cette année : que le plus de personnes possible s’attachent ou se ré-attachent au Christ, comme les sarments à la vigne. Le vent du monde va souffler très fort l’année prochaine et au cours des années qui viennent. Il va secouer notre beau pays et la vigne du Seigneur dans tous les sens. Mais si nous restons fermement entés à l’évangile du Christ, charitables, obéissants, en particulier à nos évêques, pauvres et chastes dans notre vie, à l’imitation du Christ, nous demeurerons pour toujours ! Alors bonne et heureuse année en Jésus Christ, « le même hier, aujourd’hui et à jamais » (He 13, 8).

Frère David Perrin

Frère David Perrin