Prendre racine en Dieu

par | 6 octobre 2019

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Je me suis toujours demandé combien de personnes avait tenté l’expérience : se mettre devant un arbre et lui ordonner, au nom de la foi en Jésus-Christ, de se déraciner et de se planter dans la Garonne ! autrement dit, faut-il prendre cette image au premier degré ? je préfère pour ma part de pas tenter Dieu et réfléchir sur le sens spirituel de cette image. Que veut-elle signifier ? j’interpréterai volontiers ainsi : la foi, gros comme une graine de moutarde, est ce don de Dieu, capable de déraciner l’homme de sa propre terre, c’est-à-dire de son égocentrisme, univers enfermé sur lui-même afin de le planter dans un lieu que l’homme ne peut connaitre par ses propres moyens, que seul Dieu peut révéler, lieu qui ouvre l’homme à la vie en Dieu, à la vie éternelle, à la vie en plénitude.
L’homme ne peut pas connaitre par lui-même, par ses talents, par ses capacités, Dieu et son projet, l’économie du Salut, les différentes étapes par lequel Dieu révèle ce qu’il est, ce qu’il veut, ce qu’il fait. Dieu le révèle quand il s’adresse à son peuple à travers la création, à travers les patriarches et les prophètes, l’incarnation, la passion, la mort et la résurrection de son fils, par l’Esprit-Saint par l’intermédiaire de l’Église. Tout ce contenu rejoint l’homme, au plus intime de lui-même, et répond aux questions existentielles qui le travaillent à savoir d’où il vient, son histoire et ses origines ; où il va, le but et la finalité de sa vie ; la beauté de la vie et ce qui la rend digne et respectable ; la souffrance, les épreuves et la mort ; l’homme, être à la fois un et complexe. En recevant de Dieu la foi, ce contenu divin, l’homme n’est-il pas déraciné de lui-même et planté en Dieu, n’est-il pas rassasié dans sa soif de compréhension. N’est-il pas libéré de son ignorance et n’est-il pas illuminé par ces vérités qui viennent nourrir sa quête de sens.
Les mystères de Dieu, accueillis par l’homme, envahissent toutes les dimensions de son être, ses dimensions biologiques, psychologiques et spirituelles afin que la sagesse de Dieu rejoigne la sagesse de l’homme, son existence. L’homme n’est pas appelé simplement à les connaitre mais à en faire l’expérience, car ces mystères non seulement révèlent à l’homme ses désirs ancrés dans sa personne, ses inclinations naturelles à savoir la recherche de la bonté, de la vérité, de la survie, de la fécondité naturelle et spirituelle, de la construction de la société ; mais aussi et donne à l’homme les motifs de bonheur à travers ce qu’il est appelé à accomplir dans son quotidien, à travers ses projets, ses engagements et la force de les accomplir. cela plante l’homme dans cette vie en Dieu où il reçoit les effets de la grâce, ses fruits : le bonheur en Dieu, l’épanouissement de tout homme, la joie, la sérénité, la paix.
Cela ne se réalise pas en un coup de baguette magique. L’enfant de Dieu ne doit pas oublier qu’il est un simple serviteur et qu’il ne fait qu’assumer son devoir ; un être responsable car Dieu lui a confié une tâche, de prendre soin de ce que Dieu lui a confié. Que l’homme n’oublie jamais qu’il est en tension permanente entre ce qu’il est et ce qu’il est appelé à être, ce qu’il a déjà réalisé et ce qu’il lui reste à réaliser, entre ce qu’il a déjà reçu de Dieu et ce qui lui reste à recevoir de lui afin qu’il l’enracine dans cette terre nouvelle. Être déraciné et être planté en Dieu, ne se fait pas en un jour. L’homme peut admirer la patience, la persévérance et la miséricorde de Dieu pour chacun de nous.

fr François-Régis Delcourt, op.

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Frère dominicain