Sermon du Mgr Jean-Paul James – Ordination diaconale du fr. Jean-Baptiste

par | 26 février 2020

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Aujourd’hui, un religieux est ordonné diacre. La vocation religieuse de Jean-Baptiste éclaire d’une manière toute particulière, le diaconat qu’il reçoit. Diacre, c’est à dire serviteur du Seigneur, de Sa Parole et de Sa Charité. 

Oui, Serviteur du Seigneur. Pour la fête de la Chaire de Saint Pierre, nous entendons la profession de foi de l’apôtre : « Tu es le Christ le fils du Dieu vivant ! » Ce n’est pas une simple réponse à une question de catéchisme. C’est une exclamation, un émerveillement, qui vient de bien plus profond que la simple intelligence de Pierre. Simon Pierre est passionné pour le Christ ; il s’engage tout entier à sa suite, comme vous cher Jean-Baptiste aujourd’hui, mais d’abord le jour de votre profession solennelle. En effet, au départ d’une vocation religieuse, il y a une rencontre, un coup de cœur, une passion pour le Christ. Toute votre vie religieuse, c’est d’abord l’émerveillement pour un tel choix du Seigneur à votre égard. Et désormais, c’est ce Christ, fils du Dieu vivant que vous servirez dans le ministère diaconal. Je n’ai jamais oublié la recommandation de Madeleine Delbrel à un jeune qui venait d’être ordonné prêtre (cela vaut pour le diacre) : “Ce que nous désirons trouver dans le prêtre ? c’est qu’avant d’être ceci ou cela, il soit du Christ-Jésus. Ce que nous désirons de lui ? Ce qu’il peut nous donner : le Christ de l’Evangile et des sacrements ». En recevant l’ordination diaconale aujourd’hui, vous Frère Jean-Baptiste, religieux vous nous rappelez que tout service dans l’Eglise, n’est pas une simple fonction ; tout ministère dans l’Eglise ne se comprend qu’à cause de l’Amour pour le Christ, notre Maître et Seigneur. Ceux qui vivent ces engagements, le font parce qu’ils ont été séduits par le Christ, parce qu’ils veulent vivre pour le Christ et avec lui. Seraient-ils des héros ? Non ! faibles comme Saint Pierre ! Oh, il croyait y arriver, lui Pierre, les Evangiles de cette semaine le rapportaient : toi, Seigneur, subir la Passion ! Non, tu vas voir : Je vais t’éviter les ennuis ! Et l’Eglise, et le couvent de Toulouse, ça va marcher, tu vas voir ! « Pierre, Pierre, j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas ! » (Lc 22,32) Oui, cher frère Jean-Baptiste nous sommes fragiles ; témoignez que nous sommes appelés par grâce, ordonnés par grâce, rendus fidèles par grâce ! Une grâce accueillie dans les larmes parfois, comme St Pierre croisant le regard de Jésus dans la cour du grand prêtre ! En dehors de cette communion intime avec le Christ, nous ne pouvons pas affronter la mission qui nous est confiée. 

Serviteur du Seigneur, serviteur de Sa Parole. Frère Jean-Baptiste, par vos années de vie religieuse et vos études, vous êtes devenu un familier de l’Ecriture Sainte. Peut-être avez-vous relevé dans le Nouveau Testament que si les termes de diaconos, de diakonein évoquent le service de la table, ils évoquent trois fois plus souvent celui de la parole. La prédication à vos frères, et aussi à tant de jeunes, d’adultes au couvent des dominicains ou ailleurs est diaconie de l’Evangile. Aussitôt ordonné et après la vêture, je vais vous remettre 

l’Evangéliaire. Ce service de la Parole, vous le recevez le jour où l’Eglise souligne le ministère d’enseignement de l’Apôtre Pierre et des papes, ses successeurs, mais aussi des évêques, des prêtres, des diacres. Et ce ministère est majeur ! Ce ministère, vous allez le vivre comme frère prêcheur, attaché à la prédication, à nourrir, à encourager la foi de vos auditeurs. Vous vivrez ce service de la Parole en dominicain, vous rappelant la phrase de St Thomas d’Aquin : « contemplare et contemplata aliis tradere ». Voilà votre place spécifique à rappeler à tous et à vivre : On ne peut transmettre et annoncer que ce qu’on a contemplé, médité, goûté dans le silence du cœur. Votre témoignage de diacre dominicain est important pour nous, dans les diocèses et les paroisses. Nous avons besoin de votre présence dans l’Eglise. 

Serviteur de la Parole, Serviteur de la charité de Dieu. Où s’incarnera votre service ? Bien sûr, dans les aumôneries, paroisses, centres spirituels où vous serez envoyé, mais d’abord dans votre couvent. Votre ancien Maître général aimait raconter qu’un jour, agacé par la paresse d’un de ses frères, son supérieur l’interroge : « Mais que fais-tu ? » Réponse : « Je suis un signe eschatologique, j’attends la venue du Règne ». Le supérieur n’avait pas été satisfait ! Frère Jean-Baptiste, vous allez vivre ce service de la charité de Dieu, d’abord près de vos frères dominicains. Service qui se décline en tant de noms : partage, miséricorde, communion fraternelle, attention aux plus petits. Par le sacrement de l’ordre, vous êtes désormais Jésus lavant les pieds, Jésus faisant passer à table, Jésus aimant pleinement, et cela dans la banalité des jours, et l’étroitesse d’un couvent. Le service de l’amour fraternel dans une communauté, est le critère de vérité, le baromètre de la relation au Christ. D’ailleurs, dans les débuts de l’Ordre, on appelait la communauté dominicaine, « une sacra praedicatio », une sainte prédication. Vivre ensemble en frères, est déjà une prédication, avant même que quiconque ait prononcé une parole. Bien sûr, il ne faut pas idéaliser ! Mais vivant le service concret, pratique près de vos frères, vous êtes un témoignage dont nous avons besoin : beaucoup pensent que ce qui gouverne le monde, c’est le chacun pour soi, la violence, et que la vie ensemble est devenue impossible. Frère Jean-Baptiste, diacre, vous témoignerez qu’il y a une vraie joie de servir dans les actes les plus banals du quotidien. Vous nous redirez à nous vos visiteurs, que ce qui pèse dans la vie du monde, ce n’est pas ce que les journaux relatent ou ce que voient les hommes, c’est l’amour invisible qui dans les gestes les plus simples du service, construit peu à peu le Règne de Dieu. Oui, il est beau ce service diaconal dans lequel vous frère Jean-Baptiste uni à vos frères, vous vous engagez. Avec vous et pour vous, nous implorons l’Esprit-Saint, l’Esprit d’Amour. Amen.

 

Mgr Jean-Paul James, archevêque de Bordeaux.

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Frère dominicain