Feu purificateur qui divise et sépare

par | 22 août 2019

Il se dit beaucoup d’âneries sur la foi, le christianisme ou les chrétiens. Et rassurez-vous, je ne vais pas en faire la liste ce dimanche, car ce serait un peu long. Parmi les lieux-communs aussi faux que condescendants, il y a celui qui veut que la vie chrétienne serait une fuite de la dure réalité du monde. Par peur d’affronter le tragique de la condition humaine, les croyants trouveraient dans la religion un échappatoire où tout ne serait que gentillesse et douceur. Dieu ne serait que le remède à nos angoisses existentielles. Et puisqu’il est convenu parmi les gens intelligents que dieu ne saurait exister, la religion agirait à la manière d’un placébo.
Si c’est ce que la religion est sensée nous apporter, alors nous nous sommes trompés de religion ! La vie chrétienne est tout sauf un paradis artificiel ! Bien sûr, la foi nous promet le paradis au terme de cette vie, mais ici-bas, c’est une toute autre histoire. Que celui qui veut dormir tranquille ne devienne jamais chrétien ! « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? – demande Jésus. Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. » Et la lettre aux Hébreux compare l’existence chrétienne à une épreuve et à une lutte contre le péché, jusqu’au sang.
Que ceux qui n’ont jamais été accablés par le découragement d’être chrétiens s’inquiètent. Car, en vérité, il se pourrait qu’ils se soient fabriqué un christianisme à « l’eau de rose ». La vie chrétienne n’est pas « le monde des bisounours ». Feu, Division, hostilité, épreuve et lutte : voilà la réalité de la vie à la suite du Christ.
Le christianisme authentique est source de division et non d’abord de paix sur la terre. Il divise car à la manière d’un feu purificateur, il sépare l’or de ses impuretés. Ainsi là où l’Evangile est annoncé et vécu sans compromission, il se heurte nécessairement aux mensonges de ce monde qui se rencontrent jusque dans nos familles. Etre chrétien, c’est refuser le mal en toute circonstance, au risque de l’exclusion. Combien de convertis ont vu leur famille leur tourner le dos ? Combien de carrières professionnelles arrêtées pour avoir refuser de prendre part au mal ? Combien de moqueries pour avoir osé se dire chrétien ? Un chrétien ne tue ni ses enfants, ni ses vieillards. Un chrétien ne commet pas d’infidélité. Il ne vole pas, ne médit pas de son prochain, ni ne convoite ce qui n’est pas sien. Le simple respect de ces interdits fondamentaux créé une ligne de fracture dans notre monde, mais aussi en nous-même. Un chrétien qui se sait pécheur, ne peut jamais se reposer sur ses lauriers. Il vit le péché qui l’habite comme une division intérieure. L’Évangile n’est pas d’abord pour lui paix, mais un glaive à deux tranchants qui vient révéler les profondeurs de son coeur. Embrasser la foi, c’est embrasser la croix. Devenir chrétien, c’est crucifier en soi l’homme ancien vendu aux mensonges de ce monde.
La vie chrétienne authentique ressemble ainsi plus à une course d’obstacles qu’à un fleuve tranquille. Pourquoi est-ce ainsi ? C’est en raison du péché affirme la lettre aux Hébreux. C’est le péché qui alourdit nos vies si bien que notre marche vers Dieu devient une véritable course d’endurance. Nous allons à Dieu lestés de toute part, entravés. On comprend pourquoi la vie chrétienne passe d’abord par une lutte, ou pour être plus précis, par une transformation. Il s’agit de revêtir l’homme nouveau et de tuer en nous l’homme ancien, vendu au pouvoir du péché. Cette transformation nous est pénible, car elle implique des renoncements. Il en va de l’oeuvre de la grâce nous comme d’un accouchement et cela ne va pas sans douleur.
Si la vie chrétienne ressemble par bien des aspects à une valeur de larmes, il ne faut donc pas s’étonner qu’ils sont rare ceux qui s’y engage et y persévère. Mais cela en vaut la peine. Car n’oublions jamais que dans une course, il faut toujours avoir en vue le but. C’est l’espérance de la victoire qui nous fait supporter les efforts et les contrariétés du chemin. Regardez les saints dit l’Ecriture. Contemplez cette nuée de témoins arrivés au but. Levez les yeux vers le Christ, autrefois pendu au bois de la croix, aujourd’hui dans la gloire du Père. Que l’espérance des biens à venir soutienne notre marche !
Fr. sébastien Perdrix, op.

Fr. Sébastien Perdrix