Que demander de plus? – Plus que la pureté, le salut
Que demander de plus? – Plus que la pureté, le salut.
Lc 17, 11-19
Tous les dix n’ont-ils pas été purifiés ? – ta foi t’a sauvé.
Quand votre chair pourrit et ce lentement, pendant des années, en vous laissant en pleine conscience, et voilà que votre corps redevient net, semblable à celui d’un petit enfant, que demander de plus ? Quand vous vivez en exclu, visage voilé, traînant dans les ordures, criant « je suis impur » à l’approche de tout homme, et voilà qu’on vous réintègre dans la vie de votre famille, de votre cité, de votre fratrie, que désirer de plus ? Quand vous êtes un opprobre incarné, une malédiction vivante, interdit de s’approcher de tout signe religieux pour ne pas le souiller par votre existence même, et voilà qu’on vous introduit dans le Temple, le prêtre se penche sur vous, vous touche et vous déclare pur aux oreilles de tous les fidèles – peut-il y avoir un relèvement plus grand ? Et pourtant, tout cela n’est qu’un écho lointain de la miséricorde divine, n’est qu’une étape vers ce geste absolument unique et improbable : revenir sur ses pas en glorifiant Dieu et se jeter aux pieds de Jésus en lui rendant grâce.
Glorifiant Dieu – mais non plus dans le Temple de Jérusalem. En lui rendant grâce – mais non plus dans la cité de David, mais aux pieds du fils de David, Jésus, en reconnaissant en lui Dieu qui sauve. Un seul pour rendre gloire à Dieu ! – s’écrie le Christ. Tous partent se montrer aux prêtres. Un seul touche Dieu, aux pieds de Jésus en lui rendant grâce.
Ils étaient dix à entendre la promesse de la purification. A un seul il a été dit : « ta foi t’a sauvé ». La purification n’est donc pas encore le salut. La guérison du corps n’est donc pas encore ce que le Christ veut nous donner. L’intégration dans la société par un décret solennel des prêtres n’est donc pas encore ce que Jésus désire pour nous. C’est quand nous nous prosternons à ses pieds en reconnaissant en lui ce Dieu qui nous purifie, que notre salut advient.
D’autres peuvent guérir. La miséricorde des hommes peut guérir les corps. Et bénis soient ceux qui se dévouent à soulager les souffrances des malades ! – mais Dieu entend nous mener plus loin. D’autres peuvent réconcilier. La miséricorde des hommes peut réintégrer dans la société. Et bénis soient ceux qui œuvrent pour pacifier notre monde déchiré ! – mais Dieu entend nous mener plus loin. Sa miséricorde fait ce qui est impossible à la nôtre. Seule la miséricorde de Dieu peut nous mener au Christ. A ses pieds dans l’actions de grâce sur cette route poussiéreuse qui monte à Jérusalem ; à ses pieds sur les pierres du Calvaire lorsqu’il meurt pour nous sur la Croix ; à ses pieds dans un jardin embaumé de la Résurrection, quand il se relève d’entre les morts, brisant à jamais toute souillure et toute malédiction ; à ses pieds enfin dans le Royaume des cieux qui est son Royaume ! Là, Dieu seul peut nous mener, sa miséricorde seule peut nous élever, à la vie éternelle.
Guérison, purification, réconciliation – que demander de plus ? Il nous faut demander Dieu à Dieu. Il nous faut demander ce que la miséricorde de Dieu seule peut nous donner : reconnaître dans la chair de Jésus Celui qui a modelé notre chair et qui la guérit. Reconnaître dans l’humilité de Jésus ce grand prêtre qui nous purifie par son sang sur l’autel de la Croix. Reconnaître enfin dans le Christ ce Dieu qui nous réconcilie avec lui, et donc entre nous, et donc avec la création entière. Le reconnaître, l’adorer, en nous jetant face contre terre à ses pieds pour entendre à notre tour : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé ».
Cette chair de Jésus nous est donnée. Ce corps du Christ nous est livré. Ce grand prêtre s’offre au milieu de nous. Puisse la miséricorde de Dieu nous saisir quand nous le recevrons !