Vigiles de Pâques

par | 26 mars 2016

Frère Dominique

Vigiles de Pâques – 2016

fr. Dominique-Raphaël Kling, dominician

Aujourd’hui naît le monde et une parole l’annonce.

Aujourd’hui la Parole faite chair naît au Ciel et le monde l’annonce.

Nuit Sainte, où le voile se déchire, de bas en haut au cri de l’Alleluia.

Ce n’est plus sur terre la naissance du Verbe que nous annonçons, c’est la naissance de l’Homme au Ciel que nous célébrons.

Dieu est descendu en la Nuit de décembre. Aujourd’hui l’Homme dans le Christ s’élève dans cette nuit de passage.

Non plus l’obscurité du Ciel qui s’ouvre au Gloria des Anges mais la ténèbres de la Terre qui laisse jaillir du Tombeau le cri de l’Alleluia.

Non pas des myriades d’anges qui annoncent aux hommes, mais des hommes de toute race, langues, peuples et nations qui proclament aux anges ébahis la victoire du ressuscité.

Ce n’est pas une étoile qui guide nos pas vers une pauvre Crèche, ce soir, mais le soleil du feu pascal qui nous fait sortir du Tombeau vide vers nos frères.

En cette nuit, vraiment, Dieu a séparé la lumière des ténèbres.

En cette Nuit, vraiment, Dieu comble la descendance d’Abraham de bénédiction

En cette Nuit, vraiment, la Parole accomplit son voyage et met au monde le monde.

I Une Parole

Que ce soit ce prêtre chinois dans sa cellule obscure, ces chrétiens d’Irak d’Erbil, Qaraqosh ou dans les tranchées, notre frère ou sœur malade cloués sur leurs grabats de solitude, nos frères dominicains au Pakistan ou nos sœurs au Yemen qui pleurent encore: tous sont réveillés par ce cri qui déchire la nuit, cri primordial d’un monde qui naît au Ciel.

Un seul cri, une seule Parole dans ce presque-sacrement du monde qu’est la Résurrection : la résurrection n’est-elle pas le signe visible d’une réalité invisible ; ce tombeau vide empli de l’Alleluia ne signifie-t-il pas ce qui se réalise ?

Chers Catéchumènes : dans ce cri s’accomplit la naissance du monde, dans ce cri s’accomplit le commencement de votre vie au Ciel. Nom caché depuis la fondation du monde, le cri de la résurrection dévoile la destinée invisible du visible.

Et tout sacrement s’y origine :

– que ce soit dans l’eucharistie : ceci est mon corps ressuscité

– la confirmation : le feu de la Pentecôte fait jaillir de la Cendre de nos faiblesses l’amour vainqueur de l’Esprit Saint

– le mariage : signe des noces éternelles de Dieu et de l’Église

– l’onction : qui configure la fragilité de notre maladie à l’offrande du Christ mort et ressuscité

Au fond, dans tout sacrement, à la question « au nom du Père du Fils et du Saint Esprit », le monde crie et répond l’unique parole de cette nuit : Alleluia, le Christ est ressuscité et moi je le suis et le serai en Lui

Chers catéchumènes, et nous baptisés, c’est dans la Nuit que s’imprime dans l’âme cette Parole secrète de la naissance du monde au Ciel. Qu’importe si le monde de la terre nous hait, les combats de toutes sortes et en connaissant quelques secrets de vos vies, chers catéchumènes, je sais qu’ils n’ont pas manqué. Car désormais Joseph, Thérèse, Maxime, Laure, Juliette, Augustin, par le baptême, un nom nouveau sera ciselé dans le vôtre et l’habitera d’une lumière qui toute votre vie annoncera l’aurore. C’est la seule parole qui mérite vraiment d’être prononcée : elle dit tout de Dieu, elle dit tout de nous. Être Chrétien ? C’est n’avoir qu’un seul mot aux lèvres, l’alléluia pascal.

II Un geste

Une seule Parole dans ce sacrement de la Résurrection ? Un seul geste immense !

Pour le comprendre mieux, notons que tout à l’heure vous serez marqué de l’eau oar le baptême. Les Lectures en ont fait apparaître l’ambivalence :

– Signe de mort / signe de vie

– d’un côté la mer rouge, de l’autre le Jourdain

– l’élément le plus terrestre (il habite les profondeurs de la terre), de l’autre le plus céleste dans ces nuages que nous n’apprécions que modérément

– Impossible d’y respirer pourtant nous naissons enveloppé d’elle

Alors  quel est le Geste de ce quasi-sacrement de la  Résurrection, du sacrement de votre baptême ?

A la croix, par son Cœur a coulé un fleuve d’eau vive et ailleurs « quand je serai élevé de Terre, j’attirerai tout à moi »

Dans la Geste de la Résurrection, dans le geste du Baptême, spirituellement s’inverse la gravité qui réduit toute chose à la  poussière. L’eau signe paradoxale, de mort et de résurrection inverse son cours à la Croix : toute notre vie, toute votre vie, goutte après goutte, se rejoint en un torrent immense pour couler par le Cœur du Christ, comme en remontant, en vous emportant à Lui.

Par le baptême, être plongé dans la Grâce ? C’est alors un torrent impétueux où nous nous immergeons, nous nous abandonnons à l’attraction infiniment aimante du Cœur transpercé, et nous nous laissons entraîner, et coulant par cette blessure, nous passons pour ainsi dire la porte étroite, la Porte Sainte de sa miséricorde pour habiter la maison du Père.

III Voici l’heure

Que conclure ? Voici l’heure : celle de la jointure de la Parole et du Geste qui engage notre salut et dans quelques minutes le vôtre.

– le Fils de l’Homme va être glorifié et vous en Lui

– Fils d’homme adopté en Dieu, vous allez être sanctifié et par vous le monde

Voici l’heure, et c’est maintenant, où vous allez pour la première fois vous asseoir à la Table Sainte, et nous avec vous, emporté par votre amour du Christ. Chacun, nous allons  reconnaître le Christ à la fraction du Pain

Cette l’heure, c’est la vôtre !

Avec vous, c’est la nôtre !

Le Christ est ressuscité et le temps entre dans l’éternité !

 

Le Christ est vraiment ressuscité et c’est l’heure de l’éternité, la vôtre, la nôtre !

fr. Dominique-Raphaël Kling, op

Frère Dominique

Frère Dominique