La Joie chrétienne nous hisse à la Cime de nous-mêmes !

par | 13 mai 2012

La Joie chrétienne nous hisse à la Cime de nous-mêmes !

Temps Pascal année B – 6ème dimanche – 13 mai 2012  Actes 10,25…48, 1°Jean 4,7-10, Jean 15,9-17

  1. « Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous » nous a dit Jésus – et qui mieux est « la joie en sa plénitude ». Mais, reconnaissons-le, ne nous arrive-t-il pas d’avoir parfois le sentiment que les paroles du Seigneur semblent taillées pour un autre monde que le nôtre ? Ou qu’elles sont proportionnées à d’autres cœurs que les nôtres ? Ainsi encore : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés ; demeurez dans mon amour.» Et le moyen de cela, sera de garder les commandements de Jésus qui lui-même garde ceux de son Père. Paroles fortes ; fidèles de Jésus-Christ, nous aimerions les adopter et en vivre. Mais ne paraissent-elles pas naïves ou abstraites ?

En effet, comment faire au quotidien ? Tant de problèmes nous assaillent, lançant leurs banderilles, et nous fatiguent comme si nous avancions dans des marécages. Ne serait-il pas alors plus profitable que Jésus soit plus concret ! Serait-ce trop demander ? Jésus proclame qu’il fait de nous ses amis. Il certifie que s’il révèle le Mystère de Dieu c’est afin que nous ayons la joie en plénitude. Ces paroles peuvent nous sembler sincères et vraies, mais… l’amitié de Jésus pour nous et sa joie sont-elles si évidentes ?

Il ne s’agit pas ici de jouer les avocats du diable, mais de regarder la situation de ceux sur qui notre regard se pose, et l’épreuve partagée de la misère. D’ailleurs, n’entendons-nous pas des remarques comme celles-là presque tous les jours ! Ne s’éloignent pas seulement de Dieu des cœurs trop durs ou des intelligences obscurcies et  orgueilleuses ! Ce serait trop simple ! Cet éloignement de Dieu, contemporain et profond, est souvent sincère à défaut d’être selon nous juste et vrai. Il vient d’un esprit qui ne sait plus à quel saint se vouer ; ou qui tente de se débrouiller en ce monde, n’estimant plus honnête d’en espérer un autre ! Oui, pour certains, les promesses de Jésus-Christ n’offrent pas une réponse lisible à leur requête, nous le savons. Il leur est difficile de s’appuyer sur ces propos du Christ, des propos pourtant si fondateurs pour d’autres personnes !

 

  1. Cependant les paroles de Jésus nous stimulent et nous remettent en selle. Elles nous auront interrogés, nous demandant : est-ce vrai ? En quoi ? Ces paroles affirment qui nous sommes pour Dieu, et la communion qu’il veut avec nous. D’une telle plénitude va rejaillir en nous une confiance qui s’exprimera en prière ; une amitié capable par grâce de répondre à la sienne ; une joie aussi inattendue que vraie. Car qui ne voudrait notamment vivre de la joie du Seigneur ?

La joie ne devrait-elle pas être la marque du chrétien comme le rire est le propre de l’homme ? C’est aussi avec elle que les chrétiens sont attendus devant des cœurs souvent assiégés !

Entre la tristesse des jours et les Mystères de la Parole de Dieu, nous constatons que la joie en sa plénitude est du côté de Dieu. Quand Dieu se déplace vers nous, il salue d’un « Réjouis-toi ! » Oui, « Réjouis-toi, Comblée de grâce, le Seigneur est avec toi ! » Oui, Bergers de Bethléem, « Je vous annonce une grande joie, aujourd’hui vous est né un Sauveur ».

Et quant à l’Apôtre Paul, il écrira au milieu de mille soucis : « Réjouissez-vous dans le Seigneur (…) réjouissez-vous ! Que votre douceur soit connue de tous les hommes. (…) En toute chose faites connaître vos besoins à Dieu par des prières … avec des actions de grâces. Et la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées en Jésus-Christ. » (Philippiens 4,4-7). La révélation chrétienne se déployant, le cœur humain va s’en trouver comblé et la joie s’y s’épanouir.

La joie est un fruit de l’Esprit-Saint et un enfant du bonheur. Impalpable quand nous voudrions la saisir, mobile quand nous souhaiterions la posséder, nous la reconnaissons au sourire des lèvres, à l’éclat d’un visage, à la tonalité d’une voix, dans un geste inattendu ou une entreprise audacieuse que la grâce et le cœur auront pu susciter !

Pâques a scellé l’union de la foi et de la joie chrétiennes. En conséquence, notre espérance de la vie éternelle sera réjouissante. Mais pour qu’elle éclaire un visage, il lui faut chaque jour du temps et du bonheur, et que Dieu l’arrose.

  1. Pourtant, portés par ces paroles, aurions-nous à notre tour oublié le quotidien ? Et notre expérience ne dit-elle pas que la joie est vulnérable ?

Cependant, elle n’est pas un rêve. Elle ne dispense pas le chrétien de vivre dans un monde insatisfaisant à ses yeux, défiguré par le péché et sa tristesse. Mais plus le croyant sera chrétien, plus il œuvrera avec une force venue de Dieu pour transfigurer le monde qui passe. Il voudra éclairer un monde au sein duquel habitent tant d’enfants de Dieu, ignorants de leur identité divine ou l‘appréciant mal. Face à la tristesse ou la peine, le regard chrétien aussi peut se voiler de larmes. Portée par l’Esprit Consolateur, notre joie permettra de consoler dans les ténèbres.

La joie divine qui resplendit dans le cœur des saints est notre guide, une nuée lumineuse au cœur de tout exode, un sommet où Dieu nous donne rendez-vous.

 

Les paroles de Jésus ne sont pas trop grandes ; elles apportent la justesse qui nous manque, l’audace qui peut consoler et  rayonner.

Et la joie chrétienne nous hisse ainsi à la cime de nous-mêmes ; nous ne sommes pas loin de pouvoir alors vivre en action de grâce ! Aussi réécoutons Jésus : « Je vous ai dit cela pour  que ma joie soit en vous, et que votre joie soit en plénitude. » Puissions-nous, mâchant ces mots, les ruminant au long des jours, vivre de leur grâce !

Fr. Hugues-François Rovarino, op

Fr. Hughes-François Rovarino