Pécheur ? Qui est pécheur ? Juste un peu enveloppé, c’est tout ! – fr. Paul Marie Cathelinais op

par | 16 septembre 2007

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Il est à craindre que les brebis modernes n’aient pas la même simplicité que les brebis antiques… En histoire contemporaine, quand le pasteur débarque, généreux et prêt à pardonné, la brebis moderne prend les jambes à son coup et elle se taille. La brebis d’aujourd’hui préfère en effet son confort de solitaire et sa paix de cimetière ! Elle prétexte qu’elle n’a rien à dire, qu’elle se débrouillera bien toute seule ; au pire, elle se souvient du témoignage d’une brebis récupérée au dernier moment. La petite préfère les histoires gentilles et les jolis sermons à une vraie rencontre ! Ainsi en va-t-il de nous quand il s’agit de confessions. Pourquoi l’Eglise insiste tant sur la confession ? Trois raisons :” Voir ce qui est ! “, ou la différence entre Jésus et Prométhée.Dans un dialogue avec les filles de l’Océan, Eschyle met en scène Prométhée, enchaîné et crucifié sur un rocher. Là, notre demi dieu énumère tout le bien qu’il a fait aux hommes. Il leur a donné le feu, qui a permis de fondre les instruments de travail ; d’où est née l’intelligence technique et par suite la civilisation. ” Mais, dit-il, je leur ai donné quelque chose de bien plus grand encore ; je leur ai donné l’illusion qui leur fait oublier la mort et les fait vivre sans souci de leur véritable destin. ” La croix de Jésus a-t-elle, elle aussi, anesthésier notre conscience ? En nous appelant à partager son amitié, Dieu ne nous appelle pas à l’illusion. Les plaies de Jésus ne nous feront pas oublier qu’il nous faut changer. A quoi bon la prière, la liturgie, la pratique des sacrements s’ils nourrissent en nous une sorte de bonne conscience arrangeante… Le bon pasteur n’a pas sauvé pas la brebis perdue de loin, il va la chercher en bas, il la rencontre. Quand Jésus rencontre Marie Madeleine, Pierre, la samaritaine ou Zachée, il ne leur cache ce qu’ils sont : des faibles, des pécheurs ; et le péché dont ils sont victimes, ils en sont aussi les complices ! La venue de Dieu dans une vie commence toujours par accroître la lucidité : que vous voulez que fasse un médecin en face de celui qui ne veut pas se savoir malade, que peut faire un sauveur devant celui qui ne veut pas sortir de sa prison ? Le confessionnal est le lieu de la vérité car c’est à la mesure de la sincérité de notre cœur que nous découvrirons enfin ce que veut dire la Miséricorde infinie de Dieu pour nous. Pour nous, ou plutôt pour moi car la confession engage. C’est la seconde raison !Engagement réel de la personne.Peut-être est-on persuadé dans l’abstrait que Dieu est bon, fort, tout puissant mais par la confession on va le découvrir expérimentalement, concrètement. De tous les sacrements, en effet, seule la confession nous engage personnellement. Par conséquent je crains qu’a force de ne pas se confesser on finisse par croire que Dieu n’existe pas vraiment pour moi. ” Loin des yeux, loin du cœur “. En fait, l’obligation à la confession vient du fait que Dieu n’a pas toléré pardonner tout seul. Dieu compte sur ce dialogue concret. Le confessionnal est le lieu concret de ce principe théologique bien connu : Dieu qui nous a créé sans nous, ne nous sauvera pas sans nous ! Avec jalousie, avec tendresse, notre Seigneur veut que nous soyons convaincus de la part réelle qui est nôtre dans la réconciliation. Remarquons bien que dans la parabole du fils prodigue, si le Père n’a de cesse de l’attendre, la réconciliation n’a lieu qu’a l’occasion d’une rencontre pénible. Le père se présente à nous comme s’il voulait être vaincu par notre aveu ! C’est devant l’aveu humble d’un homme à un autre homme que le juste Juge devient Miséricorde. C’est très beau, se disent beaucoup d’entre nous mais que dois-je avouer, suis-je si pécheur pour devoir être tant pardonné ? Un peu comme Obélix, quand il entend le mot gros : Pécheur ? Mais qui est pécheur ? Juste un peu enveloppé, c’est tout !!!! Ici intervient ma troisième raison !Retrouver sa liberté !Dans son dernier livre le Cardinal Ratzinger, montre que le fils aîné de la parabole est amer. Il est comme ceux qui ne font pas de péchés ou pas beaucoup ! En apparence, il est juste. En réalité, dans son for intérieur, il aurait aimé lui aussi, partir au loin vers la grande liberté, et mener la belle vie ! Il est secrètement envieux de ce que son frère a pu se permettre. Extérieurement il est sage, mais intérieurement il a déjà désobéi dans son cœur. Voilà peut-être ce que nous aurions a confessé, nous qui n’avons rien à dire. Il s’agira de reconnaître que nous sommes des frustrés de la grande liberté : que nous ne voulons plus être des saints, que nous voulons plus aimer Dieu de tout notre cœur, que notre désir a vieilli et que la volonté de Dieu nous pèse comme un fardeau aussi lourd que fade. Le confessionnal deviendra alors le lieu du Passage entre un Dieu que je subis à un Dieu d’amour. Se confesser, c’est découvrir que son joug, n’est pas une loi de fer, mais deux bras qui enserrent. Que sa parole ne vient pas d’une bouche en colère, mais d’un baiser : ” Toi mon enfant tu es toujours avec moi et tout ce qui est à moi est à toi. “Je n’ai pas parlé de la femme qui cherche sa drachme ! On imagine la scène : cette femme va tout envoyer en l’air dans la pièce ; les coussins, les papiers, les assiettes. Et tout devient désordre ! Mais elle découvre enfin le trésor. Se confesser c’est accepter de montrer son désordre intérieur. Pour découvrir qu’il existe en nous un endroit, une plage pure et immaculée que le péché n’a pas détruit. Qu’au centre de notre demeure, Dieu est présent comme un pur diamant qui veut rayonner dans tous les aspects de notre vie. La confession est un simple effort de mémoire au fond, un travail d’anamnèse qui commençant par notre histoire la plus sombre ou la plus banalement médiocre remonte jusqu’à ce jour béni où Dieu est devenu l’hôte et le père très aimant de mon âme. Amen !

fr. Paul Marie Cathelinais op

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Frère dominicain