Serviteur de tous

par | 23 septembre 2018

Comment peut-on être le serviteur de tous ? Je peux servir mon prochain. Je peux servir le membre de ma famille. Une mère de famille, un père de famille savent bien qu’ils sont là pour tous les autres membre du foyer. Mais mon foyer n’englobe pas tous les hommes. Mais comment peut-on devenir le serviteur de tous ? De tous, sans exception ?
Deux pistes à explorer.
D’abord, je suis appelé à devenir le serviteur de chacun. Avant de penser à tous, pensons à chacun. Chaque homme que je rencontre, chaque personne que je croise est un enfant bien-aimé de Dieu. Pas facile de le tenir. Souvent ces gens sont désagréables, peu conformes à mes attentes, leur manière d’être peut me déplaire, leur manière de vivre peut me choquer ou même être franchement injuste. Je n’ai pas en effet à approuver une barbarie ou une incivilité érigées en style de vie. Néanmoins, cette personne que j’ai devant mes yeux, chaque personne que j’ai devant moi est désirée par Dieu. Voulue par Dieu. Dieu l’a tirée du néant. A chacun il dit : Sois ! Existe ! Il appelle chacun par son nom. Si, par la grâce de Dieu, j’arrive à poser sur chacun le regard de foi qui voit en lui un enfant de Dieu – peut-être égaré, peut-être perdu, peur-être malheureux, mais un enfant bien-aimé ! – alors mon service peut commencer. Alors je peux discerner de quoi mon prochain – chacun, pris séparément – a-t-il besoin. Une parole d’encouragement ? Un conseil ? Un coup de main? Une présence ? Ce regard de foi posé sur chacun est le tout premier service, il est le commencement de l’amour.
Proposons-nous cela comme une œuvre de Dieu : dans les jours qui viennent, nous arrêter de temps en temps et poser sur les personnes que nous rencontrons ce regard. Voilà un homme, voilà une femme qui sont chers au cœur de Dieu. Que puis-je faire pour leur bien ? L’accueillir comme un enfant de Dieu. Quiconque accueille en mon nom un enfant comme celui-ci, c’est moi qu’il accueille. Et celui qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille, mais celui qui m’a envoyé. Et peu à peu notre cœur se trouvera au large.
S’ouvrira alors un chemin plus large encore. Devenir le serviteur de tous. Dieu nous a donné un pouvoir vertigineux : nous pouvons poser les actes qui élèvent le monde. Non seulement tel ou tel de nos proches, mais tout homme, tous les hommes. Notre intercession, ne la prenons pas pour une chose négligeable ! Notre pauvre prière est précieuse aux yeux de Dieu. Pensons à tous ceux pour qui personne ne prie. Qui naissent et qui meurent sans que le nom de Dieu soit invoqué sur eux. Qui souffrent et qui luttent sans que la miséricorde de Dieu soit implorée pour eux. Une âme qui se donne au ministère de l’intercession change le monde. Notre baptême, notre consécration chrétienne n’est notre petite affaire à nous ! – nous l’avons reçu au profit de l’univers entier. Dieu nous a établis, nous, chrétiens, ministres de salut de nos frères dans la foi, mais aussi de ceux qui ne croient pas encore.
Pourquoi ne croient-ils pas ? Un grand mystère. Mais ont-il eu dans leur vie une rencontre – personnelle, chaleureuse, vraie – avec un ami de Jésus ? Ont-ils entendu parler du Dieu de l’Alliance par ceux qui vivent de cette Alliance ? Il y a certes des livres et des médias, il y a des murs et des pierres, mais ont-ils entendu des cœurs qui leurs parlent, des bouches et des yeux qui annoncent le seul nom sous le ciel par lequel nous devons être sauvés ? Être serviteur de tous, c’est aussi communiquer à tous cette sagesse qui vient d’en haut – pure, pacifique, bienveillante, conciliante, pleine de miséricorde et féconde en bons fruits.
Enfin, être serviteur de tous, c’est être artisan de paix. C’est dans la paix qu’est semée la justice, qui donne son fruit aux artisans de paix. La paix est un bien commun, une richesse commune – on ne peut en jouir qu’ensemble. Nul ne peut la posséder au détriment des autres. Nul ne peut la faire sienne si l’autre en est privé. Chercher la paix, la bâtir – c’est être serviteur de tous. D’où la paix vient-elle ? Qui en est l’artisan premier. S. Augustin nous dit, que la paix est la tranquillité de l’ordre. Lorsque tout est en sa place, lorsque tout grandit selon son ordre propre, lorsque la vie se déploie selon vers sa vraie plénitude, alors seulement la paix règne. Être artisan de paix, c’est avant tout faire œuvre de justice – établir toute chose à sa juste place, à sa vraie place. De cela, nous sommes tous responsables. Puissions-nous chercher la volonté de Dieu en chacun de nos actes, et alors nous serons les artisans de paix et les serviteurs de tous.
Servir chaque homme, servir tout homme – c’est la vie même de Dieu qui donne vie et existence à toute chose. Puissions-nous en être de dignes serviteurs !
Fr. Pavel Syssoev, op.

Fr. Pavel Syssoev