Subir ou offrir, il faut choisir
Aujourd’hui commence donc la « sainte quarantaine », ces quarante jours qui nous préparent à Pâques. Ces quarante jour qui nous préparent à fêter la résurrection du Christ. Ces quarante jours qui nous préparent à fêter notre libération de la mort et du péché. Ces quarante jours qui se présentent par conséquent comme un chemin de libération.
Chemin de libération en vertu de son terme, Pâques, nous venons de le dire qui est notre libération de la mort et du péché, notre libération de la vie sans but que nous mènerions sans le Christ mort et ressuscité pour nous. Mais chemin de libération aussi en vertu du chemin lui-même. A savoir les fameux efforts que nous sommes invités à faire pendant le carême en termes de jeûne, de prière et d’aumône. Efforts qui touchent à notre relation à nous-mêmes (le jeûne), à Dieu (la prière) et à notre prochain (l’aumône). Efforts donc qui à ce titre visent à nous libérer de tout ce qui entrave la charité et la vie de la grâce en nous.
Sauf que si le terme de cette sainte quarantaine est enthousiasmant, le chemin qui nous y mène l’est généralement un peu moins. Nous voulons bien être libérés et célébrer le Christ ressuscité mais pas au prix de ces quarante jours d’efforts qui nous pèsent et nous coûtent. Surtout s’il s’agit d’être déçus de nous à la fin. Aussi abordons-nous bien souvent le carême sans enthousiasme pour en pas dire avec appréhension. Le carême devient un passage obligé, un exercice contraint que nous subissons de plus ou moins bonne grâce.
Ne voyons-nous pas là comme une contradiction ? Alors que le carême est censé être un chemin de libération nous le vivons comme une contrainte. Or si nous le vivons ainsi, comme une contrainte, le carême n’est plus et ne peux plus être un chemin de libération. Car le carême n’est vraiment chemin de libération que si nous y entrons et le vivons librement, volontairement, non par contrainte subie.
Le carême touche donc à notre compréhension même de la liberté, la liberté chrétienne, la liberté des enfants de Dieu. Une liberté qui se présente non comme la capacité à faire ce que nous voulons, comme nous voulons, quand nous voulons mais comme la capacité à nous diriger par nous-mêmes vers le bien. De sorte que notreliberté ne consiste pas tant à ne faire que ce que nous voulons, qu’à donner un sens à tout ce que nous vivons. Et elle nous permet ainsi de ne plus subir mais d’offrir ce que nous vivons. A l’instar du Christ dont nul ne prend la vie mais qui la donne de lui-même.
L’alternative en définitive est assez simple : subir ou offrir. Il n’existe pas d’autre option. Soit nous faisons le choix de subir les contraintes, et elles n’en seront que plus douloureuses et stériles, soit nous faisons le choix d’offrir ce que nous vivons. De l’offrir, i.e. de le faire résolument, librement, volontairement nôtre en y mettant tout notre amour. Alors nous le vivrons avec joie et notre liberté sera réellement féconde.
Que notre carême soit une école de liberté. Amen.
fr. Romaric Morin